Forêt Carnelle
Forêt de Carnelle : Etymologie
Depuis le milieu du onzième siècle jusqu’au début du quinzième siècle, la forêt de Carnelle est appelée la forêt du Comte, par référence à ses propriétaires, les comtes de Beaumont sur Oise qui étaient apparentés aux rois Capétiens.
Après la mort de Jean de Beaumont en 1223, la forêt devient l’apanage du roi Philippe Auguste et jusqu’après le XIVème siècle, elle restera appelée sous ce vocable. Ce n’est que depuis cette période où elle porte son nom actuel de laforêt de Carnelle.
Etymologiquement, les mots de caro, carnis, pourraient être empruntés à la langue latine et signifient chair. Faut-il supposer que dans cette forêt se pratiquaient des sacrifices de chair humaine ? Ces sacrifices se pratiquaient sur des autels, les dolmens. Nous n’en retrouvons aucune trace dans la forêt ou les villages alentours. Mais leur absence résulte peut-être des ordonnances des rois Childebert et Chilpéric, puis aux injonctions des capitulaires du roi Charlemagne, qui ordonnaient au peuple de détruire tous les signes d’idolâtrie celtique.
Il est plus probable que ce nom de Carnelle provient du mot celtique Cairn ou Carn qui signifie butte ou élévation et non «pierre» comme le suggère certains auteurs en faisant référence au monument mégalithique mortuaire appelé laPierre Turquaise ou Pierre Turquoise.
L’abbé Grimot, curé de l’Isle-Adam dans les Mémoires de la Société Historique et Archéologique de l’Arrondissement de Pontoise et du Vexin – 1879 semble de cet avis, puisqu’il écrit :
«Qu'il me soit permis, avant de terminer, d'oser dire ma pensées sur le nom celtique de notre forêt de Carnelle. Je ne ferai du reste que répéter la leçon d'un de nos philologues les plus autorisés. Ne peut-on pas rapprocherCarnelle et Carnutes de Carnac? Il me semble qu'on doit assigner à ces noms la même origine, la racine étymologique, parce que tous appartiennent à la langue celtique, parlée depuis la Gaule orientale jusqu'aux extrémités de l'Irlande. Rappelons aussi que la langue des Erses antiques(1) désigne par un mot analogue les mêmes monuments celtiques : ce mot erse est cuira, corn, carne. Il signifie : monceau-sacré, monument.
Le promontoire Carne-soir ou pointe, cap du monument sacré, est désigné dans Ptolémée sous le nom de : Promontorium sacrum, ce qui est presque la traduction du mot Erse.
Chez ces peuples anciens les Carnes étaient dédiés au soleil, objet primitif de leur culte, et probablement cause de leur orientation. C'est ainsi qu'il y a encore aujourd'hui en Irlande un lieu appelé : Cairne-Grainey, autrement dit le Monument du Soleil.
Cornac, carnaux, carnelte, carnutes, etc… signifient donc, suivant les différents dialectes : le monceau-sacré ou les monceaux-sacrés. En effet, dans la plupart des localités qui portent un nom analogue, on voit encore, outre des dolmens, des menhirs, des éminences ou monticules sous lesquels, presque toujours, on inhumait les chefs de la peuplade.
J'ajoute enfin que ce mot générique : cairn, carnac, carnelle, carnutes, etc… peut fort bien être rapproché de l'hébreu : keran, karn, kran, qui, lui aussi, signifie : corne, pointe, stèle, éminence pointue ; d'où vient sans doute le mot latin : cornu».
Ernest Seré-Depoin, au sujet du nom de Carnelle, nous rappelle que les cairns (monticules de pierres élevés par les Celtes) sont des tombeaux de chefs Gaulois que l'on trouve en Bretagne, en Ecosse et en Irlande. Le mot Cairn est encore conservé de nos jours par les montagnards pour désigner un amas de pierres leur servant de repère.
Carnelle semblerait donc bien formé du radical celtiqueCarn qui veut dire «monticule, montagne» auquel est ajouté le suffixe diminutif ella.
Une autre possibilité étymologique existe. Le mot pourrait être dérivé de Carme, forme picarde du charme, qui est une essence d’arbre commune dans la forêt.
Les deux solutions sont plausibles. |
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feuilles de charme |
Jean-Pierre Auger